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némès, le plus utilisé des couvre-chefs dans la
représentation du souverain égyptien, ne se composait,
à l'origine, que d’un simple tissu, qui, appliqué sur une
tête ou une perruque, permettait de la recouvrir et de la protéger.
Ce tissu originel avait une forme rectangulaire
et sa disposition sur la tête était simple : le
bord supérieur venait se placer le long du front, contournait
les oreilles pour, finalement, pendre dans le vide au-dessus des épaules.
A
l’arrière, au lieu de laisser le tissu libre, les extrémités
étaient sûrement rapprochées et disposées dans
une cadenette.
Par cette disposition sur une tête, même rasée, certaines
parties du némès comme les ailes, les surfaces temporales
ou bien la coiffe vont apparaître, mais elles ne sont pas encore
tout à fait nettes comme ce sera le cas dès les premiers
némès « aboutis » de la IVe dynastie.

En
observant la statue de Djoser conservée au musée égyptien
du Caire (JE 49158), il semble évident que ce couvre-chef recouvrait
une perruque ou des cheveux, et jouait donc son rôle protecteur. Cette
perruque n'est pas visible dans sa totalité, la partie supérieure
étant recouverte par le tissu, il n'est donc pas évident
de l'étudier et de savoir quelle était sa forme, notamment
au niveau du haut de la tête.
Etonnement, les statues que nous possédons de ses successeurs ne nous
montrent déjà plus de perruque (par exemple, la tête de sphinx de Didoufri
conservée au Louvre (E 12626), ou bien les différentes statues
de Chéphren)!
Quelle forme pouvait donc bien avoir cette perruque?

Il
existe, heureusement, quelques rares oeuvres présentant une perruque
fort ressemblante à celle que porte Djoser. Il s'agit de statues
datant exclusivement au règne d'Amenemhat III : un torse représentant
le pharaon vêtu d'un habit de prêtre, recouvert d'une peau
de léopard, découvert dans le temple de Sobek à
Mit Faris et conservée au musée
du Caire (JE 20001); un buste conservé à Rome, au
musée
des Thermes (8607) et le groupe de statues, communément surnommé
"Double-Nil", représentant deux personnages dont les
bras, posés sur des motifs floraux, proposent des poissons en
offrandes, et conservé au musée
du Caire (CG 392).
Il
parait évident, en observant ces trois statues, que si l'on avait
voulu protéger ces perruques si particulières en les recouvrant
d'un tissu, c'était irrémédiablement la forme du
némès qui devait s'imposer, car chaques particularités
de ces perruques semblent correspondre à un élément
du couvre-chef.
Détaillons-les.
La
poche à l'arrière du némès semble des mieux
appropriée à contenir les tresses que l'on retrouve indiffèremment
dans le dos de toutes les statues. Ces tresses, remontées en
une masse compacte, vont pouvoir ainsi être maintenues sur la
nuque et remplir cette poche, ce qui donnera au némès
une de ses caractéristiques principales.
Quant
à la grosse tresse centrale, sûrement trop épaisse
pour être relevée comme les autres, il n'y avait guère
d'autre alternative que de pratiquer une ouverture au milieu de la poche
pour la laisser sortir, quitte à en enfermer l'extrémité
dans une gaine rigide.
A
l'avant, les deux amas de tresses sont laissés en place puis
recouverts par le tissu qui évoluera, petit à petit, pour
donner les retombées.
Au
niveau du front, l'épaisseur des cheveux étant moins importante,
le tissu peut aisément les recouvrir et adopter la forme arrondie
du haut de la tête et du front.

Le
premier némès connu après Djoser est celui que
porte la tête de sphinx de Didoufri conservée au Louvre
(E 12626). Sur ce némès, toutes les parties constitutives
du couvre-chef (à part la tresse, absente et les retombées,
détruites) sont telles qu'elles seront représentées
par la suite jusqu'à la fin de l'histoire égyptienne et
la perruque a déjà disparue. On
peut alors se poser la question de savoir comment cette perruque si
particulière a pu disparaître si brutalement dans la représentation
du couvre-chef.
Il
n'existe, à ma connaissance, que deux oeuvres qui puissent nous
aider dans la compréhension de la disparition de cette perruque.
Il s'agit de deux têtes du règne de Mykérinos découvertes
par Georges REISNER sur le plateau de Gizeh,
et conservées, l'une au Caire
(JE 40471) et l'autre à Boston
(09.204).
Ces
deux oeuvres se détachent des oeuvres portant un némès
car on peut observer des motifs s'apparentant à des cheveux qui
se répartissent sur le front et les tempes pour la tête
du Caire, et uniquement sur les tempes pour celle de Boston.
On
ne connaît malheureusement pas la répartition chronologique
de ces deux oeuvres, mais la logique voudrait que la tête conservée
au Caire ait été réalisée avant celle de
Boston. On aurait ainsi une disparition progressive de la perruque,
tout d'abord au niveau du front, puis ensuite au niveau des tempes.
Il
est important de faire remarquer ici que les pattes ne sont jamais représentées
sur les némès avant Mykérinos, tandis qu'après
son règne, elles le seront toujours. Il est fort possible que
les motifs de la perruque au niveau des tempes aient étés
recouverts par le tissu, et qu'ils auraient ensuite conservé
cette forme pour devenir les pattes.
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